Ce circuit de 9km passe par la Forêt de Landerneau et revient par les rives de l'Elorn. Une jonction est également possible pour rejoindre Landerneau.
+ La Forest-Landerneau, le château de la Joyeuse Garde
D'après Albert Le Grand [1], saint Ténénan aurait accosté près du château de La Forest au VIe siècle, et fondé un ermitage:
... ayans heureusement traversé la grande Mer Britanique, aborderent à la coste de la Bretagne Armorique, &, rengeans la coste de Leon, entrerent, par le détroit Mulgul, dans le Golfe de Brest, le long duquel ils cinglerent à pleines voiles & entrerent dans le Canal de la riviere d'Elorn, qui est le bras de Mer qui vient à la ville de Landerneau [La premiere édition porte Landt-Ternok, et c'est toujours ainsi qu'Albert Le Grand a écrit le nom de cette ville. — A.-M. T.], & prit terre au pied du Chasteau de Joyeuse Garde.
...Saint Tenenan descendit du Vaisseau & fut receu en grande réjouissance du Capitaine, de tous les Soldats & du Chasteau, & aussi des Chrétiens qui estoient cachés dans cette Forest, lesquels le vindrent salüer comme leur Pere & Protecteur, envoyé de Dieu pour les délivrer de leurs miseres. Le Saint se retira avec eux dans la Forest, &, voyant l'exercice de la Religion Catholique negligé parmy eux, d'autant qu'ils mettoient tout leur soin à se garantir, eux & leurs biens, des incursions des Barbares, il leur fit bastir deux Eglises pour leur commodité, l'une vers le bas de la Forest, non loin du Château, laquelle fut nommée Ilis gouêlet Forest, à cause de sa situation qui estoit au fond de ladite Forest, & porte maintenant le titre & nom de saint Tenenan ; l'autre Eglise fut édifiée à l'autre extrémité de la méme Forest & fut appellée Plou-bennec, dediée en l'honneur de Dieu & de saint Pierre Apostre.
L'église de La Forest est effectivement dédiée à saint Ténénan. Quant au château, il n'existait sans doute pas au VIe siècle, du moins pas à son emplacement actuel. On trouve à quelque distance des traces d'habitat gallo-romain [2]. Le cadastre de 1827 indique également à l'ouest du château une parcelle appelée "La motte", et une autre "parc ar vouden" (le champ de la motte) [3]. Il existe également un village appelé La Motte à 1500m au nord-ouest.
La pièce de monnaie la plus ancienne découverte au cours des fouilles est un penny d'Alexandre III d'Ecosse (1280-1286) [4, p. 82], et on peut penser que le château a été bâti dans la seconde moitié du XIIIe siècle.
Le château médiéval était une résidence des vicomtes de la branche cadette de Léon. Le long du mur nord, les fouilles [4] ont mis à jour trois salle accolées. Une première salle de 7mx9m est adossée à la tour nord-ouest. On trouve ensuite une seconde salle de 7mx10m, et une troisième de 7mx20m. En poursuivant vers l'est, toujours le long du mur mord, on trouve une quatrième salle, isolée des précédentes. La porte ouest a des montants moulurés, et elle a été identifiée comme étant la chapelle. Il y a une cave au centre du château et des bâtiments accolés à la tour sud-est. Les tours ont un diamètre externe de 8m et des murs de 4m d'épaisseur. Elles sont percées d'archères. Un fossé profond protégeait l'édifice. L'entrée était à l'ouest. Le portail à couloir ogival a été conservé.
On dispose d'un acte de 1411 qui indique que le château était appelé "Goelet-Forest" (le bas de la forêt). (DOM Morice, Preuves, tome 2, col 850):
"Guillaume Riou de l'âge de 66 ans ou environ dit qu'il a ouy dire des anciens qu'au temps d'un Seigneur de Leon appellé Hervé fieuz Mahaut, il y ot un vessel d'estrange pais, qui posa à l'ancre ou port de Camaret & s'en départit du port sans payer le devoir d'ancrage ou dit Seigneur, & ouit dire que celuy vessel fust tant poursuivi, qu'il fut prins & rendu au dit Seigneur dans le havre de Landerneau, devant son manoir de Guoeslet-forest, ou il pourist."
Le château de La Forest a également identifié à la forteresse de "G(h)oy-la-Forêt" mentionnée par Froissart en 1341 et 1342 [4, p. 60].
En 1342, "Messire Robert d'Artois (du parti de Montfort) si com vous poes, oïr avoit assiéget le citet de Vennes (Vannes) à mille hommes d'armes et trois mille arciers et couroit tout le paiys environ, l'ardoit exilloit et détruisoit tout jusques à Dinant (en Bretagne) et jusques à le Roce Periot (La Roche Pirou au sud du Faouët) et jusques à Ghoy Le Forest (Goele-Forest près de Landerneau). Et n'osoit nulz demorer sur le plat pays s'il ne voloit le sien mettre en aventure tout jusques au soseniot (Suscinio dans le Morbihan) et le Roce Bernart (La Roche-Bernard)".
En 1479, le vicomte de Rohan publie un mémoire dans lequel il énumère ses possessions et indique que Goele-Forest a été la résidence du roi Arthur:
"Forêts grandes et notables et grand nombre de bu1ssons de haultes fustaies et autres à savoir la forêt da Goël Forest près laquelle il y a un château audit vicomte de grand et honorable édifice auquel le roi Arthur faisoit sa résidence"
On ignore s'il y avait une tradition établie avant cette date. Toujours est-il que le château de Goelet Forest est devenu le château de la Joyeuse Garde, et a été associé à la légende d'Arthur, de Lancelot, de Tristan, d'Yseult, et des chevaliers de la Table Ronde. D'après Frèminville, ce serait le chevalier Luce du Guast ou de Gast qui, dans son roman de «Tristan le leonois», traduit du latin au XIIe siècle, aurait été le premier à mettre en scène un château de Joyeuse Garde, dans les romans de chevalerie [5, p. 53].
On ignore comment le nom de Goelet-Forest s'est transformé en Joyeuse Garde. La plus ancienne mention date de 1636 [1]. Froissart ayant mal orthographié "goelet-forest" et écrit "goy", "Goy-Forest" pouvait facilement devenir "Joie-Forest", puis être assimilé à Joyeuse Garde.
C'est ainsi que Tristan arrive en vue du château de la Joyeuse Garde accompagné d'Yseult. Il descend de cheval et engage Yseult à prendre un peu de repos:
« Qu'il est doux, le chant des oiseaux.
Il peint la tendresse et l'inspire,
O mon Yseult, sous ormeaux.
Peut-être serait-il à propos
D'écouter ce qu'il veut nous dire. »
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+ Landerneau, trois paroisses et une trève
La paroisse Saint-Houardon est d'origine monastique. Elle doit son nom à Houardon, moine du VIIe siècle, successeur de saint Thénénan en tant qu'évêque de Léon (Sanctus Hoarzonus). L'église Saint-Houardon est située au centre de Landerneau, à 300m au nord de l'Elorn.
La paroisse de Beuzit-Conogan est également d'origine monastique. Conogan y aurait vécu en ermite au VIe siècle avant de succéder à saint Corentin en tant qu'évêque de Quimper. Au XIIe siècle Beuzit-Conogan devient un prieuré dépendant de l'abbaye de Fineterre. La paroisse est rattachée à Landerneau en 1790. Construite au XVe siècle et aujourd'hui ruinée, l'église est située au bord de l'Elorn, à 2500m à l'ouest de Saint-Houardon. Il est probable que la voie antique qui reliait Carhaix à la Pointe Saint-Mathieu passait près de l'église.
La paroisse de Saint-Thomas rappelle le souvenir de Thomas Becket, archevêque de Canterbury assassiné en 1170 dans sa cathédrale. C'était un prieuré dépendant de l'abbaye de Daoulas. L'église est située à 100m au sud du Pont de Rohan.
L'hôpital de Saint-Julien avait été fondé en 1336 par le vicomte de Léon. Il était situé près du pont sur l'Elorn, côté Cornouaille. Dom Morice a retranscrit l'acte de fondation dans le premier volume de ses Preuves publié en 1742 : "l'hôpital que nous avons fondé pour le soulagement des infirmes, et établi à la tête du pont de Landerneau, en la paroisse de Ploudiry, en l'honneur de Dieu et des Saints, spécialement de saint Georges, martyr, et saint Julien, confesseur". L'hôpital semble à l'origine de la trève de Saint-Julien. Après la Révolution, à la restauration du culte, l'église de Saint-Houardon ayant été vendue, il fut un moment question d'utiliser Saint-Julien comme église paroissiale. Le prix des travaux semble avoir été dissuasif. Il aurait notamment fallu rehausser le sol parce que l'église était envahie par l'eau à chaque marée d'équinoxe. De plus, deux routes royales se rejoignaient à Saint-Julien pour continuer vers Brest, la n°12 venant de Paris, et la n°170 venant de Nantes. Il n'y avait que 5 à 6 mètres entre Saint-Julien et l'Elorn, ce qui aurait rendu la sortie de l'église dangereuse. En 1803 la Municipalité fut bien contente de pouvoir racheter Saint-Houardon qui devint église paroissiale.
+ Landerneau, église Saint-Houardon
Vers 1860, l'ancienne église Saint-Houardon a été remplacée, dans un autre quartier de la ville, par une église moderne. De l'ancien édifice on a conservé le porche et la partie supérieure du clocher.
Le clocher de l'ancienne église aurait été surmonté d'un globe doré représentant la pleine lune, et au dessus un croissant figurant le premier quartier (Abbé Mével, Notice sur la paroisse de Trémaouézan, 1924, p.66). C'est peut-être là l'origine de l'expression la "Lune de Landerneau". Il est un vieux dicton breton qui dit "An nep a ia euz a Landerne da Lesneven, al loar a bar var e gein, hag an heol var e dal. A la lettre, celui qui va de Landerneau à Lesneven, la lune brille sur son dos et le soleil sur son front" (Abbé Mével, ibid, p. 65). La lune pouvait être le symbole de Landerneau, et le soleil celui de Lesneven. L'expression est devenue célèbre depuis qu'un gentilhomme de la région de Landerneau, en visite à Versailles fit remarquer que la lune de Landerneau (de Saint-Houardon) était bien plus grosse que celle qui brillait ce jour là à Versailles.
Le porche est l'un des plus parfaits existant dans la région. Il a été construit en 1604. Celui de Ploudiry, inachevé, le reproduit exactement.
Dans l'église, un tableau de Yan'Dargent rappelle les origines de Saint-Houardon. La peintre a choisi le moment où saint Houardon approche des rivages de Bretagne. Le saint est représenté en vieillard, la mer est agitée et le ciel tourmenté. Saint Houardon est pensif et indifférent aux éléments déchaînés qui l'entourent. Il a pour bateau une grosse pierre poussée par deux anges. Le tableau a été peint en 1859. C'est l'une des ses oeuvres majeures. Entre 1891 et 1893, Yan'Dargent a également réalisé douze peintures qui décorent la nef de Saint-Houardon.
+ Landerneau, le pont de Rohan et l'hôpital Saint-Julien
Le gué de Landerneau avait une grande importance dès l'antiquité. La voie romaine de Carhaix à la Pointe Saint-Mathieu y franchissait l'Elorn à cet endroit, et une petite agglomération gallo-romaine s'est développée à Landerneau.
Pendant tout le Moyen Age, le passage de l'Elorn à Landerneau a conservé une grande importance et un pont a été construit. En 1372, le pape Grégoire XI accordait des indulgences pour la restauration du pont :
« Hospitale St Juliani situm in capite pontis de Landerneau ubi magnus concursus est perigrinorum euntium ad ecclesias Beatorum Michaelis in monte Gargano et Mathei in finibus terrarum, pauperesque recipiuntur et reficiuntur, frementibus guerris jam est pene destructum... »
« L'hôpital Saint-Julien à la tête du pont de Landerneau, fréquenté par un grand nombre de pèlerins se rendant à Saint-Michel du Mont Gargan, et à Saint-Mathieu-de-Fineterre, où les pauvres sont reçus et nourris, pratiquement détruit par les guerres... »
Le premier pont a sans doute été établi au début du XIVe siècle, peut-être en même temps que l'hôpital Saint-Julien en 1336. Venant du sud, les pélerins passaient par Landerneau pour se rendre à l'abbaye de Fineterre. Au cours du Moyen Age, pour les pélerins venant du nord-ouest, Landerneau pouvait aussi être le chemin le plus court pour se rendre au Mont Saint-Michel. On pouvait suivre l'axe Landerneau-Carhaix-Moncontour-Dol. D'après J Trévédy, même à la fin du XVIe siècle, Moncontour était considérée comme « la clé de la Basse-Bretagne » (Voie Romaine de Saint-Brieuc à Vannes, Association Bretonne 1907, p.18). De Moncontour on avait des chemins qui allaient dans toutes les directions. On dispose d'une série d'actes du duc de Bretagne Jean V datés de Moncontour. Au XVe siècle, on voit le duc partir de Moncontour pour y revenir, puis repartir dans une autre direction.
En 1510, Jean, vicomte de Rohan a fait bâtir un pont monumental pour faciliter les communications entre les deux rives de l'Elorn. Une seule construction s'y élevait, le moulin féodal. Sur la façade, une plaque commémorative indiquait:
« Lan MIL Vcc X, Hault et Puissant Jehan vicomte de Rohan, comte de Porhoët, Seigneur de Léon, de la Garnache, de Beauvoir sur mer et de Bleing fist faire ces pont et moulin au devis de M. Marc Sagret procureur et Jehan Le Guiryec, receveur de ceste ville »
Plus tard, d'autres maisons ont envahi les deux côtés du pont.
La fondation de Saint-Julien a été confirmée en 1511 par Jean de Rohan. D'après P. de Courcy (Notice historique sur la ville de Landerneau publiée en 1842), l'église Saint-Julien a été commencée en 1521 et terminée en 1532. Elle s'élevait non loin de la chapelle de l'hôpital qui datait du XIVe siècle. Saint-Julien a été érigée en trève de Ploudiry au début du XVIIe siècle. Vers 1780, un mémoire présenté à Mgr de la Marche fait valoir les avantages qui resulteraient d'une annexion de Saint-Julien à Landerneau.
Jusqu'en 1930, les trois grandes routes qui traversaient la Bretagne d'est en ouest convergeaient à Landerneau. La route royale n°12 venait de Paris par Rennes et Morlaix, franchissait l'Elorn à la Roche-Maurice, puis continuait vers Landerneau et Brest. La route royale n°165 de Nantes à Audierne passait par Quimper d'où partait la route royale n°170 menant à Lesneven et à la mer. Le passage de l'Elorn s'effectuait à Landerneau d'où on pouvait continuer vers Brest. Partant d'Angers, la route royale n°164 prenait toute la Bretagne en écharpe. Elle passait par Redon, Ploërmel, Josselin, Pontivy, Rostrenen et Carhaix. Elle franchissait l'Elorn à Landerneau avant de continuer vers Brest. Après 1848, les routes royales sont devenues des routes nationales. On voit toujours la plaque routière de la route nationale n°164 près du Pont de Rohan:
FINISTERE
ROUTE NATIONALE N°164
D'ANGERS A BREST
LANDERNEAU
LA MAISON DE TERRE 26K465
SIZUN 17K205
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De la Pointe Saint-Mathieu à Carhaix
Du Faou à la Pointe Saint-Mathieu
De la Pointe Saint-Mathieu à Saint-Pol-de-Léon
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